Caroline Juy, l’intelligence de la main
J’ai le plaisir de vous présenter une couturière de talent et une femme inspirante.
J'ai rencontré Caroline au début de mon projet créatif, il y a deux ans et je lui confie, depuis ce jour, la réalisation des kimonos. Son approche des tissus et son gout pour les finitions m’impressionnent toujours. Son humilité et son parcours de femme et d’artisane me touchent.
Caroline s’est prêté au jeu de l’interview, je vous livre ses réponses.
« Mon savoir faire, c’est la connaissance des tissus, l’intelligence de la main, à force d’avoir, fait, d’avoir touché, pris en main…C’est savoir quelle finition, quelle couture je vais adapter à quel tissu. »
C’est une qualité de Caroline que j’apprécie énormément dans la préparation des créations de kimonos. Une erreur dans le mariage de deux tissus ou une finition inadaptée peut produire un résultat catastrophique… Caroline apporte son avis expert et c’est précieux.
Les finitions
« Je me rends compte qu’en fonction des tissus, les solutions me viennent naturellement. Je suis obligée de choisir les finitions avant de commencer à coudre. Et elles viennent à moi et proposent des évidences ! Je vais soigner les finitions pour valoriser ce qui est précieux ». C’est par exemple le surpiquage du surjet sur une cotonnade pour bien placer la couture ou encore, pour une soie, la finition des coutures avec un biais pour donner de la tenue.
« Ce que j’aime dans les finitions, c’est qu’elles vont prolonger la vie du vêtement. »
Caroline explique la succession des étapes de son travail, chacune a son importance pour la qualité finale du vêtement : le repassage appliqué avec un fer lourd pour bien aplatir les fibres avant la coupe. Deuxième étape très importante : bien respecter le sens du tissu, placer le patron en fonction des motifs et des indications de la créatrice. Pour le kimono en drap, trouver le milieu de la broderie et la centrer sur le patron du dos. Vient ensuite la réalisation.
« Pour les kimonos, j’ai créé une gamme de montage, bien spécifique : je réalise d’abord les manches par exemple. Le kimono n’est pas un vêtement très compliqué mais dans sa simplicité, il demande une grande attention. »
Son parcours est un chemin riche d’apprentissages, toujours l’exigence de la qualité en première ligne.
Après une école de haute couture à Lyon, elle travaille à Paris dans le costume, puis pour le cinéma comme petite main.
« J’ai travaillé aussi comme intérimaire dans des grandes maisons de coutures parisiennes, pour la préparation des collections et c’est une très bonne école. »
Ce que Caroline en a retenu : toute l’énergie qu’il faut déployer pour que tout soit prêt le jour J, le stress, la course dans les ateliers et aussi de très belles matières.
« J’ai eu accès à des tissus extraordinaires et j’ai toujours un petit sac rempli de petites chutes… » ajoute-t-elle les yeux pétillants.
Caroline a ensuite travaillé à l’Opéra de Saint Étienne, comme chef d’atelier.
« Un sacré challenge… C’est Passionnant de gérer toute la machine, faire en sorte que les tissus soient choisis, que les couturières aient du travail, ça demande beaucoup d’organisation avant le travail de couture. »
Son meilleur souvenir ? « Quand on a travaillé deux mois pour réaliser 200 à 300 costumes, et que tout d’un coup, tout est sur scène, ce que l’on appelle la costumière, la première fois que tout le monde a son costume, c’est très émouvant… ».
« Ensuite, j’ai fait de la création de vêtements pour femmes, des petites séries. Je recherche le confort et j’ai toujours beaucoup aimé aussi le volume. Le fait d’habiller quelqu’un ce n’est pas seulement l’envelopper, c’est ajouter du volume pour embellir. »
Ce qui la fait vibrer ?
« Ce qui me plait, c’est d’avoir un patron, un bout de tissu, de tout organiser pour avoir au final un vêtement qui a de l’allure, qui va plaire, qui va être porté . C’est prolonger la vie du tissu en fait. »
Caroline donne aussi des cours car elle aime transmettre son métier et s’adapter à l’envie de la personne. »